Emotions positives : adoptons une stratégie pour bien vivre confinement et télétravail

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Liens sociaux maintenus uniquement à distance, télétravail [1] contraint, garde d’enfants et « école à la maison ». Inquiétude pour notre santé et celle de nos proches, maladie nous touchant parfois de près… Nos modes de vie sont bouleversés et les émotions négatives affluent ! Comment retrouver un équilibre personnel et maintenir notre efficacité professionnelle ? Spécialistes de l’intelligence émotionnelle et psychologues du travail nous invitent à cultiver nos émotions positives. Objectif : bénéficier d’une stimulation plus décisive que jamais en ces temps troublés.

1 – Accueillons tous les signaux émotionnels avant d'envisager des actions génératrices d'émotions positives

Quelles est la fonction des émotions ? Du point de vue biologique, les substances fabriquées par notre corps lorsque nous en ressentons, nous « mettent en mouvement [2] » : en quelques secondes seulement, nous sommes capables d’identifier un danger potentiel par exemple – une aptitude ô combien cruciale aux premiers temps de l’humanité ! Plus largement, aujourd’hui comme hier, « ces facultés naturelles nous permettent de réajuster notre comportement au réel » selon les mots du fondateur d’emothink, Thierry Paulmier [3]. Avec des émotions vectrices d’adaptation, notre intelligence émotionnelle s’avère pleinement engagée en entreprise. Cette prise de conscience reste toutefois récente. Dès lors, dans nos lieux de vie mués en lieux de travail, comment faire face au flux d’émotions susceptible de nous submerger ? L’une des premières clés consiste à accueillir tous les signaux émotionnels qui nous sont transmis.

  • Face à un danger indéterminé (facteurs de risques et mesures de protection réévalués au fil des observations, dose infectieuse et charge virale encore mal appréhendées), en outre invisible vu qu’il s’agit d’un virus, une peur elle aussi indéterminée se manifeste de façon « attendue ».
  • Selon l’environnement dans lequel nous évoluons (confinement seul, en couple ou en famille), selon la richesse de nos relations sociales préexistantes, selon notre contexte professionnel également, cette peur se traduit par de l’inquiétude ou de l’angoisse.
  • Lors de nos rares sorties, une peur physique peut nous envahir face au risque de contamination lié à toute « rencontre », tout objet ou surface touchés, etc.

Au-delà de cette réaction immédiate au danger, d’autres émotions apparaissent, se manifestant en alternance :

  • Un état de tristesse, alimenté par le flot continu du décompte des décès en France et dans le monde – susceptible de conduire à une forme de léthargie, voire à la dépression ;
  • La colère face à la pénurie de matériels de protection ou de dépistage notamment – cette colère pouvant se muer en indignation devant la « défaillance » des pouvoirs publics ou, a minima, leur relative impuissance ;
  • L’envie, qui naît de l’inégalité de nos conditions de distanciation sociale – comme en témoignent les protestations ayant suivi la parution des journaux de confinement de certains auteurs ou artistes.

 

2 – Quelles actions positives mener au quotidien ? Mettons-les en œuvre pour (se) faire du bien !

Le télétravail nous donne l’opportunité de nous extraire du flux informationnel anxiogène relatif au Covid-19, avec des activités à accomplir et des échanges professionnels réguliers – surtout si nous sommes isolés dans notre confinement. Nous disposons également de leviers pour accroître notre réservoir d’émotions positives et nous « libérer » de l’emprise de leurs consœurs négatives.

  • Pour sortir de la paralysie infligée par la peur (le besoin correspondant étant la conservation de soi – à la base de la pyramide de Maslow revisitée par Thierry Paulmier), orientons-nous vers le don de soi, animé par l’émotion de la gratitude.

Prenons des nouvelles de nos proches ou de nos collègues isolés, proposons d’aller faire les courses d’un voisin âgé, partageons des ressources liées à nos champs d’expertise – entre autres. En se donnant, nous nous oublions et tenons la peur à distance. Mieux ! Après un don, nous éprouvons de la joie. Chaque don génère en outre une dynamique – plus nous donnons, plus nous avons envie de donner. En « offrant » un peu de nous, l’épreuve que nous traversons prend du sens.

  • Dans cette même perspective, faisons part de nos émotions – négatives – à notre entourage proche, en prenant garde d’évaluer sa réceptivité.

Il s’agit là de l’une des stratégies permettant de mieux vivre le confinement, identifiées dans les premiers résultats d’une étude menée sous la houlette de Bernard Rimé [4], professeur émérite de l’Institut de recherche en sciences psychologiques de l’UC Louvain. Les émotions négatives traduisant « une différence entre nos attentes et ce qu’il nous arrive, elles nous invitent à réfléchir et à produire du sens ». Pouvoir démêler ensemble les fils d’une situation et tenter d’y apporter une solution commune permet de renforcer les liens entre les personnes engagées dans cet effort de compréhension. La peur et/ou l’anxiété ressentie sont également limitées.

  • Pour se détacher de l’envie qui pourrait nous envahir, cultivons l’admiration, qui correspond au besoin d’idéal de soi [5].

En temps de crise, le fait de pouvoir célébrer des figures exemplaires nous encourage et nous fait du bien. C’est par gratitude et par admiration que nous applaudissons chaque soir les soignants sur nos balcons. Pour Bernard Rimé, cette expérience émotionnelle collective offre aux participants « une communion émotionnelle qui renforce leur sentiment d’appartenance sociale et d’intégration à la communauté ».

  • Pour augmenter le ratio d’émotions positives de notre entourage personnel / professionnel et le nôtre, partageons tout ce qui nous amuse et nous fait vibrer – dessins et vidéos humoristiques, livres, séries, films…

En effet, notre ouverture cognitive et sociale s’améliore au fil des émotions positives que nous ressentons.  

3 – Veillons à notre hygiène de vie et appuyons-nous sur nos forces pour entretenir un cercle vertueux d'émotions positives

Grâce à notre corps, nous pouvons réguler nos émotions.

  • La pratique sportive, la respiration, la relaxation, la méditation, constituent des leviers facilement actionnables dans cette perspective.

Nous sommes nombreux à être « partis courir » en étant très remontés et à avoir achevé notre séance de jogging beaucoup plus apaisés. Malgré le manque d’espace et les limitations horaires, de nombreux exercices sportifs peuvent être réalisés dans tout type d’environnement.

  • L’alimentation et le sommeil influent également sur notre capacité à éprouver des émotions positives.

Comme le souligne le psychologue du travail et consultant Adrien Chignard, « si nous déréglons notre rythme veille – sommeil, nous aurons tendance à nous suralimenter et cela aura un impact négatif sur notre bien-être ». La consommation d’alcool, de drogue ou de médicaments s’avère aussi délétère à cet égard.

  • Cette période de confinement nous donne l’occasion de cultiver nos émotions positives en lien avec nos forces [6] – des capacités préexistantes touchant à la manière de se comporter, de réfléchir ou de ressentir, énergisantes pour leur détenteur, qui permettent de « fonctionner » de façon optimale et de se développer.

En menant une activité répondant à une force (exemple : organiser un webinar ou participer à une classe virtuelle, pour faire écho à la force « apprendre, découvrir, transmettre »), nous allons remplir considérablement notre réservoir d’émotions positives. L’activation d’une force agit en effet sur l’estime de soi ainsi que sur la confiance en soi, tout en revitalisant son détenteur.   >> En résumé

  • Le tourbillon émotionnel que nous vivons nécessite une « reconnaissance » de chaque signal.
  • Cultiver des émotions positives telles que la gratitude et l’admiration protège de l’emprise délétère de la peur ou de l’envie.
  • Avec des frontières « vie pro / vie perso » atténuées, les actions engagées à titre individuel, qui nourrissent nos émotions positives, contribuent pleinement à notre renforcement professionnel.

 

[1] Un actif français sur cinq (20 %) pratique désormais le télétravail à temps plein, selon la deuxième vague du baromètre des économies régionales confinées Odoxa-Adviso Partners réalisé pour franceinfo, France Bleu et Challenges.
[2] « Émotion » vient du latin movere, mettre en mouvement.
[3] Economiste et politologue de formation, Thierry Paulmier propose une hypothèse anthropologique en opposition à celle de l’Homo Economicus : l’Homo Emoticus. Fondée sur les émotions, ce modèle explique les différents types de rapports hiérarchiques entre gouvernants et gouvernés ainsi que les formes de pouvoir et d’autorité distinctes, tout en offrant un cadre d’analyse et d’action à tout rapport interpersonnel.
[4] Bernard Rimé est professeur à la Faculté de psychologie et des sciences de l’éducation de l’UC Louvain (Belgique). Co-fondateur de l’unité de recherche « Émotion, Cognition et Santé » et ancien président de l’ISRE (International Society for Research on Emotion), il est l’auteur de l’ouvrage de référence Le partage social des émotions (PUF, 2005)
[5] Dans la pyramide de Maslow revisitée par Thierry Paulmier.
[6] Il existe plusieurs tests en ligne, gratuits, pour identifier ses forces.

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